Psycho-Criminologie

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Publié le par I. Girard
Publié dans : #Semiologie, #Victimologie
La victimologie

La victimologie est une science qui est plutôt récente puisque les premiers travaux sont apparus au milieu du 19ème siècle. Elle a intégré tardivement sa place dans la phénoménologie criminelle bien qu'elle en soit un ressort important et demeure de ce fait, toujours assez méconnue.
L'intérêt se porte effectivement plutôt sur le criminel et moins sur la victime. Pourtant la victime, souvent occultée, est la première personne concernée dans la problématique criminelle et fait donc partie intégrante de la dynamique.
Il n'y a pas de définition directe de la victimologie. On peut dire que cette science est une branche de la criminologie qui s'intéresse particulièrement à la personnalité, aux traits biologiques, psychologiques, sociologiques, moraux de la victime, à sa relation avec le criminel et sa contribution dans la genèse du crime dont elle est l'objet (directement ou indirectement). C'est une discipline multidisciplinaire où l'analyse de la victime s'étudie dans sa globalité, mais aussi dans ses dimensions individuelles afin de comprendre, prévenir, favoriser la réparation de la personne victime, tout comme son entourage.

Du point de vue du système judiciaire, la législation spécifique à la victime a émergé dans les années 60 dans les pays Anglo-Saxons. Celles-ci étaient souvent initiées dans un but d'indemnisation. L'ONU, le Conseil de l'Europe ont suivi avec pour objectif un procès équitable pour tous, un accompagnement global et professionnel des victimes.
En France, les premiers services d'Aide à la Victime ont été créés en 1982 et de nombreuses associations (130 à ce jour) se sont regroupées autour de l'INAVEM (Institut national d'aide aux victimes et de médiation). Elles offrent aux victimes : un accueil, un suivi, des informations juridiques, un accompagnement psychologique et social, un soutien lors du procès.

La première esquisse politique d'aide aux victimes date du 29 mars 1999 (rapport Lienemann).

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Les débuts de la victimologie

Née en Europe, la Victimologie doit sa création à des pionniers juristes ou psychiatres dont l'intérêt était de fonder une nouvelle approche des droits de la défense (victimes et accusés). L'étude du rôle de la victime dans le passage de l'acte criminel est mise en avant. Il n'est plus question de s'intéresser seulement au motif, mais aussi, et surtout au mécanisme de l'agression. Pourquoi telle personne agresse telle autre personne et que ressent l'agressé ?
Certains avocats ont apporté eux aussi leur pierre à l'édifice, à l'image de l'avocat roumain, Benjamin Mendelsohn qui s’insurge contre la différence de traitement réservé au criminel et à la victime qui doit supporter le fardeau de la preuve et ne perçoit que rarement les dommages et intérêts octroyés. Il élabore un questionnaire de 300 questions : la victime est-elle consentante, était-ce vraiment un crime, quelle était le degré de résistance de la victime ?, etc.
 
Van Herzig, professeur de droit et de Criminologie émettait l'hypothèse que la victime avait un rôle conscient ou inconscient dans son agression, actif ou passif. "Il n'y a pas de crime sans une victime", avançait-il dans son ouvrage "Le criminel et sa victime".  Il a tenté de décrire une typologie des victimes et a développé la notion de la "victime née".
Pour lui, la victime s'automutilerait par criminel interposé.

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Typologie de Van Herzig :

- La victime dépressive désire inconsciemment mourir et donc être tuée, car elle ne peut se résoudre à le faire elle-même.
- La victime avide de gain. Elle prend trop de risques pour assouvir ses désirs et donc se met en danger.
- La victime licencieuse qui succombe (malgré elle ou pas) à l'attraction sexuelle.
- La victime tourmentée qui ne peut vivre sans tensions dans ses relations avec les autres.

Le Hongrois, Stephan Schafer poursuit l'idée de Van Herzig avec son ouvrage "La victime et son criminel" en arguant que la victime est toujours en cause et qu'elle a une certaine responsabilité fonctionnelle. Pour ne pas devenir victime, elle doit faire attention, apprendre à ne pas provoquer l'agresseur, à ne pas avoir une posture de victime.
Henri Ellenberger, psychiatre et professeur s'inscrit également dans cette ligne même s'il nuance le rôle de la victime. Pour lui, le criminel et la victime ne sont ni l'un ou l'autre tout à fait coupable. Il propose le terme de Victimogénèse qui regrouperait les facteurs de risques qui mènent à la victimisation. Selon lui, chaque personne a le droit de savoir si elle présente un risque élevé de devenir victime à cause de son emploi ou de sa classe sociale.
Ezzat A. Fattah, docteur égyptien en Criminologie à Montréal propose également une typologie des victimes accompagnée d'une échelle de culpabilité.
- Plus la victime est responsable, moins le criminel est coupable.
Selon Fattah, certaines personnes seraient prédisposées à devenir victimes, et seraient donc catalyseur dans le crime. La victime n'est pas totalement innocente.

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Margery Fry née en 1894 a réclamé plus de justice pour les victimes juvéniles. Elle est à l'origine de la notion de "réparation pour la victime".

Israël Drapker, psychiatre, a tenté de comprendre pourquoi les Juifs avaient été massivement victimes des Nazis, de l'antisémitisme. Il a cherché à prévenir et à repérer ce qui se répétait dans le schéma victimaire collectif du peuple juif.

Dans les années 1970-1980, les victimes subissent une nouvelle fronde. Le respect des victimes est diminué, Le droit des accusés grimpe, et le nombre d'acquittements augmente (notamment pour les viols).
Des sondages voient le jour avec des études montrant l'impact que peut avoir le système judiciaire et policier sur la victime (manque d'écoute, de prise en considération, etc.)

Dès la fin des années 70 et l'abord des années 80, la tendance s'inverse. Ce n'est plus l'auteur du crime qui est mis en avant, mais la victime. Les institutions se préoccupent dorénavant de ce qu'elles vivent et de la défense de leurs droits, de la prévention, et de l'assistance à leur apporter au travers de nombreux congrès, colloques et comités.

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La victime

 

Le mot "victime", provient du latin "victima" et était utilisé avant le moyen-âge et jusqu'au 15ème siècle pour caractériser la personne ou l'animal sacrifié aux Dieux. Elle devient ensuite la personne qui subit personnellement et directement un préjudice physique, moral ou matériel causé par autrui. 
La victime peut donc être victime d'un acte criminel, d'un délit, d'une déviance, d'une humiliation, d'une catastrophe naturelle, d'une catastrophe collective, ou être impliquée dans un évènement collectif. Parfois, la notion de victimes peut s'étendre aux proches de la personne ayant subi le préjudice par phénomène de ricochet.

La victime a besoin de comprendre ce qui lui est arrivé, à reprendre le contrôle et la maitrise de sa propre vie. La reconnaissance du préjudice qu'elle a subi, que ce soit d'un point de vue judiciaire, mais également social est important dans sa reconstruction. Tout comme le sont la réparation du méfait, et la sanction donnée à l'auteur de l'acte criminel.
La justice va juger le criminel selon la catégorie de l'acte qu'il a commis assorti d'une peine qui entre dans un champ temporel, selon des preuves apportées. Malheureusement, souvent la victime ne sera pas entendue dans sa vulnérabilité, et reconnue dans sa situation de victime, voire parfois même niée en totalité (classement sans suite, ordonnance de non-lieue, relaxe, acquittement). 

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Une victime peut aussi se taire par peur de dénoncer publiquement son agresseur, par peur de revivre au tribunal l'histoire traumatisante vécue, par crainte de raviver son traumatisme, la honte d'avoir subie l'acte, la non-écoute de la société, des proches, des dépositaires de la loi, de son histoire, la peur de représailles, ou l'ignorance des possibilités offertes pour la suite à donner, le coût des poursuites d'un point de vue financier et en charge psychologique.

Au niveau des travaux de recherches, ce n'est qu'à partir de la moitié du XXème siècle que les premières études ont été consacrées à la victime avec un essor à partir de 1960.

 

Victime directe et indirecte


- La victime directe 
Elle subit directement l'acte criminel que ce soit par une attaque, un vol, une menace, une atteinte psychologique, des coups.

- La victime indirecte
Ce sont les personnes qui ne se reconnaissent pas comme victimes. Soit parce qu'elle-même réfute l'idée, mais aussi parce que la justice, leur famille, les institutions ne leur reconnaissent pas ce statut.
La victime indirecte est également le parent, l'ami, le conjoint, les collègues qui sont affectés par la victimisation de celui qui a subi l'acte. Cela peut être également le témoin proche ou éloigné de l'agression.

 

Victimisation primaire et secondaire

- La victimisation primaire
Quand on parle de conséquence et de réaction, c'est celle qui paraît la plus évidente par les effets qui sont directement reliés à l'agression, à l'acte criminel : coups, blessures, choc, troubles psychiques, destruction, perte.

- La victimisation secondaire
Ce sont les expériences vécues par la victime à la suite de son traumatisme. Elle s'opère avec le contact qui a lieu avec les personnes du système judiciaire, la police, le travail, la médecine, le thérapeute, les amis. Ce sont les expériences ressenties par la victime et les réactions qui lui sont renvoyées par les autres (rejet, blâme, non pris en compte du problème, défaut de reconnaissance, agressivité, incompréhension, etc.)

 

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Quelques ouvrages :

- M. Baril (1984), L’envers du crime. Paris, L’Harmattan, 2002 ;
- R. Cario, Victimologie. De l’effraction du lien intersubjectif à la restauration sociale, Paris, L’Harmattan, 2006 ;
- E.A. Fattah, La victime est-elle coupable ?, Les Presses de l’Université de Montréal, 1971 ;
- G. Lopez, Victimologie, Paris, Dalloz, 1997 ;
- G. Lopez, La victimologie, Paris, Dalloz, 2e éd., 2014 ;
- B. Mendelsohn, « La victimologie », R.I.C.P.T., 1956, 95-110 (publié en 1947 dans l’American Law Review) ;
- H. Von Hentig, The criminal and his victim, New Haven, Yale University Press, 1948.
- Journal international de Victimologie

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Sources : R. Introduction générale à la victimologie et à la réparation des victimes. EMC (ElsevierMasson SAS,Paris), Psychiatrie, 37-510-A-55, 2011.
La victimologie : présentation d’une science humaine peu connue, Gérard Lopez, le 3 février 2017 - http://www.justice-en-ligne.be/article951.html 

 

 

 

 

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